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Comme un air de fin des temps

 
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Pargias
archiduc
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Inscrit le: 31 Jan 2007
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Thème: subSilver (588)
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MessagePosté le: 18 Jan 16:38    Sujet du message: Comme un air de fin des temps Répondre en citant

Lorsque je suis arrivé sur ce monde, la guerre faisait déjà rage depuis bien longtemps. J’ai vite appris à connaître les héros de ce monde. De ces êtres dont la légende n’était plus à faire, certains avaient combattu depuis des temps immémoriaux, peut-être depuis les tous débuts du conflit. Ainsi va ce monde où la mort n’est pas une certitude, où la vie semble éternelle pour ceux qui le désirent. D’autres héros étaient apparus plus récemment et avaient travaillé à construire leur réputation, et j’espère que je fais parti de ceux-là, même si mon étoile ne brille pas aussi fort que je l’aurais souhaité, et pas forcément pour les raisons que j’avais prévues.

À mon arrivée, j’avais presque tout à découvrir. J’ai maintenant parcouru toutes ces terres de nombreuses fois et j'en connais sans doute la plupart des recoins. J’ai exercé de nombreux métiers avant de chercher à me perfectionner dans la forge. J’ai croisé le fer avec plus d’ennemis que je ne peux me rappeler, souvent vainqueur et parfois vaincu, apprenant que le résultat d’un combat avait finalement bien rarement de l’importance, hormis celle d’apprendre toujours plus.

Lorsque je suis arrivé sur ce monde, j’ai d’abord rejoint le peuple des Centaures. J’ai beaucoup appris parmi eux. .Mais finalement, si leur peuple à une âme plus forte qu’on ne pourrait le croire, leurs armées sont faibles et décadentes, peu appropriées pour un jeune guerrier ambitieux et combatif. Je les ai donc quitté pour rejoindre les Humains.

Que d’hypocrisie j’ai trouvé dans ce peuple ! Ils disposent d’une puissance et d’une capacité de ralliement sans commune mesure avec les autres peuples. Ils se vantent souvent de valeurs chevaleresques au combat. Ils sont pourtant capables de commettre les pires atrocités sans fléchir, et d’une autosatisfaction pleine de vanité, même dans leurs échecs, qui a fini par m’être insupportable.

J’ai finalement rejoint les Démons. Ils se sont montrés un peu plus fidèles à leur réputation, mais leur excès d’individualisme lime complètement les dents de leur sauvagerie. Au final, j’y ai trouvé des idées proprement démoniaques, mais pas les moyens de les mettre en œuvre.

Il me reste maintenant deux choses à découvrir, la magie et les Béonides. Il est toujours dangereux de mélanger les expériences, mais j’ai l’impression que le temps m’est compté. J’ai oublié mon ancienne quête, et me suis complu trop longtemps dans une situation de confort et de facilité. Il est temps pour moi de repartir découvrir ce qu’il reste de ce monde.
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Pargias
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MessagePosté le: 25 Jan 15:59    Sujet du message: Répondre en citant

Je pris donc le chemin de la Montagne. J’avais souvent contourné cette zone de loin sans jamais approcher trop près. Cette montagne était véritablement imposante, et rapidement je pus constater qu’un véritable labyrinthe la parcourait. Arriver à destination par moi-même promettait d’être ardu, même si mon sens de l’orientation était irréprochable. Mais je ne comptais pas rester seul bien longtemps.

Je réalisais rapidement qu’à chaque croisement auquel je parvenais se trouvait la même marque. Etait-ce le chemin qui me mènerait jusqu’à destination ou au contraire risquait de me faire errer éternellement dans ce dédale ? Je tentais une fois de retourner sur mes pas pour constater que la marque avait disparu. Il devait donc y avoir quelqu’un qui jouait avec moi. Je m’étais attendu à une confrontation plus directe, mais sans surprise, je savais que mon approche avait été remarquée.

Je pris la décision de suivre les marques pour voir où cela me mènerait. J’avais la très nette impression qu’on ne me faisait pas suivre un chemin direct, mais également de ne pas tourner en rond. On devait donc bien m’envoyer quelque part, tout en me faisant traîner un peu. Je finis par me dire que les montagnards devaient sans doute profiter de ce répit pour décider que faire de moi.

N’ayant plus véritablement à me concentrer sur la route à suivre, je laissais donc errer mon esprit, songeant à la période dans laquelle je vivais. Plus le temps passait, plus j’avais l’impression que l’époque des grands héros capables de galvaniser tout un peuple était terminée depuis bien longtemps. Certes, nombreux étaient ceux qui l’avaient connue et qui étaient encore présents, continuant à se battre. Mais cela ressemblait à une tentative de retrouver une exaltation aujourd’hui disparue, comme on cherche à faire revivre les fantômes du passé, l’âge d’or dont on a oublié les ravages pour ne plus voir que le côté resplendissant. J’entendais parfois l’une des phrases les plus fameuses qui reviennent sans arrêt dans la bouche des anciens : « Ah, c’était mieux avant ! »

Même les êtres les plus noirs et méprisés en leur temps, et qui avaient aujourd’hui disparus, paraissaient reprendre un peu de splendeur dans les mémoires, leurs forfaits les plus viles oubliés. On ne se souvenait que du fait que tous ces êtres avaient marqué leur époque, en noir, en blanc, ou de la couleur du sang. Mais la haine ressentie envers eux s’était effilochée, et on espérait presque leur retour. L’ennemi d’aujourd’hui était toujours plus insupportable, plus déloyal, plus agaçant que celui du passé.

Ma montée continuait tranquillement. Quelle aurait été ma place au milieu de tous ces anciens héros ? Quelle serait ma place maintenant si j’avais pu accumuler toutes ces années supplémentaires d’expérience et de gloire, de sang et de massacre ? J’étais encore très loin d’égaler le plus grand maître forgeron que ces terres aient connu. Étais-je en train d’essayer de m’en approcher en gravissant ce chemin ? Après tout, c’était ici qu’il avait vécu la plupart de sa vie, et qu’il avait produit ses plus grands chefs d’œuvre dont certains honoraient encore les salles d’arme les plus fameuses.

Je levai les yeux et vis que j’étais arrivé.
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MessagePosté le: 22 Fév 11:41    Sujet du message: Répondre en citant

Je me trouvais devant un plateau verdoyant. Un peu plus loin sur la droite se trouvait un grand lac à l’eau claire. Derrière se trouvait une paroi rocheuse percée de nombreuses grottes. Plusieurs feux brûlaient sur la plaine, avec chacun une carcasse en train de rôtir, tournant lentement au-dessus. Au-delà je voyais des parois rocheuses très escarpées, apparemment impraticables, mais connaissant la réputation des Béonides, je supposais que peu de parties de la Montagne devaient restées inexplorées.

Je pouvais voir quelques Béonides vaquer à leurs occupations, apparemment sans se soucier de mon arrivée. Alors que je commençais à m’avancer, ceux que je croisais me disaient bonjour ou me souhaitaient la bienvenue comme si ma présence paraissait normale, sans surprise. Dénéthor fut le premier, mais de nombreux autres suivirent. Il était évident que mon intention avait été comprise et que les Béonides avaient accepté que je fasse partie de leur peuple, aussi simplement que cela.

Me promenant, je ne vis quasiment aucun nouveau visage. J’avais déjà rencontré quasiment tous ces êtres sur les plaines de notre monde, et souvent croisé le fer avec eux. On me dit que je pouvais utiliser n’importe quelle grotte à l’aspect inoccupé pour me loger. Je décidai donc de parcourir les lieux pour me familiariser un peu avant de prendre ma décision, et elle n’allait pas être facile à prendre car un grand nombre de grottes étaient à l’abandon.

Comme tous les autres peuples de ce monde, les Béonides avaient connu des jours meilleurs. Ils avaient payé le prix de cette guerre éternelle. Leur population s’était amenuisée, et le sang frais se faisait de plus en plus rare. La plupart des populations avaient disparu. Certaines avaient été détruites, d’autres avaient fui vers d’autres terres inconnues. Je ne comptais plus les villages en ruine que j’avais traversés, lieux hantés par le souvenir d’un passé plus serein et prospère.

Il semblait que bientôt ne resteraient que les combattants et ceux qui les soutenaient, alchimistes, forgerons ou chasseurs divers. Tous ces peuples se battaient maintenant pour l’hégémonie d’un bout de terre sur lequel ils auraient pourtant la place de tous s’installer sans se marcher sur les pieds.

Je me demandais de plus en plus souvent pourquoi je continuais moi-même. Puis je réalisais à chaque fois que cela faisait longtemps que je ne me battais plus dans le but de conquérir un territoire, de repousser un ennemi, ou de faire prévaloir l’hégémonie de mon peuple quel qu’il soit. Je ne me battais plus que pour moi-même, dans la recherche de m’améliorer, d’apprendre toujours plus, et peut-être un jour de laisser un souvenir qui ne disparaîtra qu’avec les derniers habitants de ce monde. Les actions que je faisais en faveur du peuple dont je faisais partie n’étaient que de la poudre aux yeux pour me donner l’impression d’appartenir encore à quelque chose.

De grotte en grotte je fis mon chemin, et je finis par trouver le lieu où j’allais m’installer. Cela était maintenant évident. Quel meilleur endroit pour installer ma forge que celui qui était déjà équipé ? Il ne me fallut qu’un instant pour réaliser à qui avait appartenu cette grotte. Même s’il ne restait que de rares échantillons de ce qui avait été créé ici, la marque de Turak était évidente. Je ne me faisais guère d’illusion. Il était peu probable que j’arrive un jour à un tel niveau de perfection. Mais cela importait peu. Même si j’étais considéré maintenant comme un maître forgeron, j’avais encore beaucoup à apprendre, et quel meilleur lieu que celui-ci pour trouver l’inspiration et le goût de continuer ?

Plutôt que de m’installer dans la grotte même, je choisis de poser ses quelques affaires dans une grotte voisine qui était vide également, pour laisser tout de même une chance au premier des forgerons de revenir. Peu de temps après, j’avais déjà commencé à me mettre au travail.
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MessagePosté le: 28 Mar 11:23    Sujet du message: Répondre en citant

Mes premières réalisations confirmèrent que j’avais choisi le lieu idéal. Les installations étaient de bonne qualité, malgré le temps qu’elles avaient passé à l’abandon. D’une certaine façon, cela me réchauffait le cœur d’entendre à nouveau résonner les coups de marteau dans un lieu qui en avait tant entendus.

Parfois j’avais l’impression que tout cela restait vain. Pendant mon apprentissage, j’avais inondé mon peuple de mes œuvres, souvent maladroites. Leur utilité était parfois douteuse, mais souvent pouvait faire un peu la différence.

Mais les choses avaient changé depuis. Dans ce monde de lutte éternelle où aucun vainqueur ne semblait se dessiner, tous les héros se valaient, jusqu’à récemment. Mais une anomalie était apparue. Un être avait trouvé le moyen de se renforcer de façon incroyable. Comme tous, il avait pendant longtemps lutté dans ce monde sans pitié, imposant une marque qui aurait aussi bien pu être oubliée que remémorée s’il avait disparu.

Mais un jour il avait découvert le moyen de se développer à une vitesse jamais vue jusqu’ici. En très peu de temps, il parvint à réaliser des prouesses, disposant d’une énergie apparemment inépuisable. Sa force ne cessait se développer, plus rapidement que ce qui avait jamais été vu. Était-il un demi-dieu ? Était-il le nouvel avatar de Thor ? Quoiqu’il en soit, Hans Arkhador avait changé l’équilibre de la lutte entre les peuples.

Heureusement, il semblait parfois disparaître quelques jours. Car lorsqu’il était présent, plus rien ne pouvait arriver aux Humains. Il était capable à lui seul de réaliser ce qu’une armée entière n’avait que l’espoir de faire, sans garantie de succès. Sa présence était maintenant la garantie d’une suprématie absolue des Hommes sur leur territoire. Il n’avait de cesse de consolider les positions Humaines et d’affaiblir les autres peuples.

Apparemment, son objectif n’était pas celui de l’annihilation des autres peuples, car il retenait souvent sa main avant d’infliger le coup de grâce. Mais son œuvre constante de harcèlement devint intolérable pour les autres peuples. La haine envers lui et les autres Humains, déjà bien présente par le passé, ne cessait de croître. Leur domination était de plus en plus écrasante, mais jamais ils ne portaient le coup de grâce, comme le félin qui joue avec sa proie, donnant l’impression qu’il ne va jamais en finir. Plusieurs héros des autres peuples disparurent, certains parmi les plus anciens. C’est ainsi par exemple que Turak s’en était allé, mais il n’était pas le seul.

Personnellement, j’avais beaucoup souffert de la situation. Pendant longtemps j’avais travaillé pour aider mon peuple, forgeant les armes pour les envoyer au combat. Mais avec l’apparition de notre super-ennemi, quasiment toutes mes livraisons d’armes finissaient entre les mains des Hommes, se retournant contre nous. Après avoir persisté un moment, j’avais fini par abandonner. J’avais toujours un certain désir de m’améliorer, mais je ne forgeais quasiment plus que pour moi, encore une fois dans le but égoïste de m’améliorer, et plus dans celui d’aider mon peuple.

Forger dans ce lieu mythique pour moi qu’était l’atelier de Turak redonnait un peu de relief à mes créations. Je retrouvais enfin un peu de plaisir de faire mon métier. Il allait être difficile de retrouver le goût de servir mon peuple, de prendre le temps d’armer les miens, car la situation n’avait pas vraiment changé, mais je retrouvais un peu de cœur.
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MessagePosté le: 07 Oct 17:50    Sujet du message: Répondre en citant

L’avantage de cette forge était que la Montagne regorgeait de minerais. Tout cela se trouvait à proximité, et je n’avais donc pas besoin de faire de longs voyages pour me réapprovisionner.

Cela me permit d’expérimenter avec mes créations à nouveau. Le résultat n’était pas toujours à la hauteur de mes espérances, mais je progressais et parvenait parfois à réaliser une pièce exceptionnelle. De même, les attentes des Béonides n’étaient pas les mêmes que celles des Démons et cela me permettait de travailler sur d’autres points.

La présence de tout ce dont j’avais besoin à portée de main avait largement réduit ma dépendance de facteurs extérieurs, et c’était motivant. Ayant moins d’efforts à faire en dehors de ma passion, je pouvais consacrer plus de temps à celle-ci.

Cela me rappelait quelque peu la situation dans laquelle se trouvait ce monde. D’un côté, les Humains avaient cette facilité que je venais de trouver. Sans avoir à faire aucun effort, ils disposaient en permanence d’une forteresse quasiment imprenable, de ressource quasiment infinies pour la protéger et l’entretenir. La présence parmi eux de leur grand héros surnaturel leur rendait la vie facile.

Cela leur permettait de se livrer quasiment sans contrainte à leurs activités favorites, que ce soit la guerre, le vol, le pillage ou toute autre domaine plus productif. En cas de difficulté, ils avaient une base solide vers laquelle ils pouvaient se replier rapidement. Leur vie était donc insouciante et relativement plaisante. Ils pouvaient ignorer derrière leurs hautes murailles la haine toujours croissante que les autres peuples vouaient à leur égard. Ces autres peuples ne pouvaient de toute façon pas faire grand-chose pour changer la situation, et les rares fois où ils parvinrent à s’organiser suffisamment pour entamer ou démolir la forteresse Humaine, celle-ci était quasiment restaurée dans l’heure, comme si rien ne s’était passé.

Les autres peuples, eux, n’avaient pas cette vie facile. Ne pouvant s’entendre, ils ne cessaient de se disputer la seconde forteresse, la seule qu’ils avaient l’espoir de conserver en cas de succès de l’assaut. Ils ne cessaient ainsi de s’affaiblir entre eux, et jamais leur situation ne s’améliorait car si un peuple se trouvait enfin un peu renforcé, les harcèlements Humains les affaiblissaient à nouveau, et le cercle vicieux continuait.

Ainsi, les Humains, dans leur dépendance envers leur super héros, gagnaient une certaine indépendance. Dans les autres peuples, chacun était indépendant, peut-être trop, oubliant les vertus de la collectivité. En conséquence, ils restaient dépendant de la balance sans cesse changeante des pouvoirs.

Il était difficile de savoir quelle était la situation la plus souhaitable. J’avais l’impression d’avoir trouvé la mienne maintenant, serein pour quelques temps dans la forge que j’occupais. Mais je savais également que je ne me satisferais pas longtemps de cette position si je restais trop à l’écart du monde. Il allait falloir que je l’affronte à nouveau, et cela serait peut-être difficile.
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MessagePosté le: 07 Oct 18:02    Sujet du message: Répondre en citant

Derniers sursauts, et puis plus rien ?

Sans faillir, le monde continuait de périr. Comme un blessé à l’agonie, il y avait parfois un tressaillement, un léger sursaut de vie. Ainsi, certains anciens héros reparaissaient parfois, le temps de quelques lunes tout au plus, comme des fantômes revenant sur le lieu de leur vie pour voir qui avait pris leur place.

Turak lui-même reparut brièvement, le temps de m’enseigner un peu de la vie Béonide. Dans cette vie j’avais trouvé un nouveau challenge, encore une fois contre moi-même, et contre des fantômes du passé. Je devenais toujours plus fort et adhérais à la charte des Béoerserkers, pour le plaisir, pour avoir quelque chose à faire dans ce monde autrement si vide. Cela me donnait l’occasion de le parcourir une fois de plus, chassant les êtres qui s’y trouvaient, chassant des objectifs sans intérêt, par habitude, espérant peut-être voir qui serait le dernier, peut-être pour être le dernier moi-même.

Je suis toujours surpris de voir combien certains peuvent s’accrocher à rien. Est-ce par peur de voir où ils iront s’ils se laissent décrocher, ou par peur de ne plus pouvoir revenir si le monde se mettait à tourner à nouveau ? Mais malgré le fait qu’il ne restait presque plus personne dans ce monde, il restait tout de même juste assez d’habitants pour continuer de fournir l’ensemble des peuples, aucun n’ayant encore sombré dans l’oubli.

Les Béonides n’étaient plus ce qu’ils avaient été. Même si nous aimions toujours célébrer le retour d’anciens, tellement peu se présentaient aux Barbeuks qu’ils n’étaient guère plus qu’un petit repas de famille, avec le plaisir de se retrouver, mais aucune effervescence particulière. Je n’y avais finalement pas trouvé plus que ce que j’aurais pu avoir dans les autres peuples, si ce n’était la nouveauté, la possibilité de faire quelque chose que je n’aurais pas fait ailleurs.

Je fais depuis longtemps partie de ceux qui s'accrochent sans savoir pourquoi, songeant presque tous les jours à abandonner cette lutte sans plus aucun intérêt, sachant qu’il n’y aura rien à la fin, et pourtant refusant de le faire, trouvant toujours une raison de continuer, quelque chose de nouveau à faire, un nouvel objectif à court terme, et l’envie de ne pas laisser la victoire à mes adversaires. Mais quelle victoire. Qu'y a-t-il à gagner. Que gagnera le dernier, sinon cela, d'être le dernier, dans une solitude toujours plus grande, toujours plus inutile et vaine.

Peut-être est-il temps à mon tour de partir. Il n’y a plus rien ici. Peut-être ferais-je comme ces autres anciens une apparition occasionnelle, juste pour voir, comme on pousse la porte d’une ruine pour voir si elle est toujours habitée, ou s'il ne reste que le vent…
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